Souffrez-vous d'un trouble d'évitement expérientiel ?

Souffrez-vous d'un trouble d'évitement expérientiel ?
Julia Marquez Arrico

Rédigé et vérifié par Psychologue Julia Marquez Arrico.

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

Les classifications des troubles psychologiques et leurs approches thérapeutiques changent, évoluent. Un modèle de thérapie de troisième vague, la Thérapie d’Acceptation et d’Engagement explique qu’une grande partie de la souffrance psychologique est la conséquence ultime du trouble d’évitement expérientiel.

Le trouble d’évitement expérientiel est illustré, pour le comprendre, de manière simple. Une situation propice à sa manifestation est celle qui est considérée comme indésirable par la personne qui souffre dudit trouble, de sorte que pour ne pas devoir y faire face elle essaiera de l’éviter ou d’y échapper.

A cet effet, il est nécessaire d’apporter une précision : ne pas vouloir entrer en contact avec une situation inconfortable, ou vouloir s’en échapper au lieu de l’accepter, n’est pas un trouble ; mais plutôt une réponse normale que nous pouvons observer chez tous les animaux, humains et non humains. Le trouble apparaît lorsque surviennent des pensées rigides telles que ” Je dois être bien pour pouvoir faire les choses “, ” Je dois me sentir heureux-se pour retourner au travail “, ou ” Je ne peux pas supporter d’être nerveux-se, j’ai besoin que cela se termine immédiatement “, qui sont une source de mal-être qui ne nous laisse aucun répit.

Comment savoir si vous présentez un trouble d’évitement expérientiel ?

Les critères diagnostiques pour le trouble d’évitement expérientiel seraient :

  • Être constamment submergé-e par des pensées et des sentiments qui tournent autour de “se sentir mal”, “être triste” ou “lutter pour être bien” .
  • L’esprit génère en permanence des pensées qui tendent à lutter contre tout type de mal-être, d’incertitude ou de doute.
  • Passer beaucoup de temps au quotidien à contrôler ces pensées ou ces sentiments .
  • Le quotidien est centré sur “l’élimination du mal-être” comme une étape nécessaire pour récupérer notre vie. Apparaît le sentiment que nous ne pouvons rien faire, que nous ne pouvons continuer de grandir, tant que ces pensées n’auront pas disparues.
  • Attendre de nous sentir bien pour reprendre les activités que nous apprécions (exemple : aller au parc avec les enfants, rester avec des ami-e-s, marcher sur la plage).
femme dans un bocal sur la plage

D’où vient le trouble d’évitement expérientiel ?

L’origine de l’évitement expérientiel résulte de l’inflexibilité psychologique inhérente à la gestion du mal-être, en l’évitant ou en y échappant. Ce manque d’adaptation provoque le trouble d’évitement expérientiel, faisant que la vie de la personne qui en souffre tourne autour de l’évitement des sensations ou des pensées douloureuses.

L’inflexibilité psychologique survient lorsqu’une personne se ferme face à des pensées, des émotions ou des souvenirs pénibles. Il en résulte que cette absence de flexibilité inhibe la poursuite des activités quotidiennes favorisant le bien-être, et ce même s’il existe une ou plusieurs sources de mal-être. Est présente l’idée fixe que nous devons préalablement “être bien” pour profiter de tout type d’activité ou de tâche.

Lorsqu’une personne présente un problème au niveau psychologique, comme l’anxiété ou la dépression, cette inflexibilité aggrave significativement sa situation. Ne pas accepter le mal-être résultant de l’anxiété ou de la dépression et chercher à l’éliminer pour pouvoir reprendre la vie a deux conséquences :

  • Être dépendant-e du mal-être et essayer de le contrôler ne fait que l’augmenter. Rappelez-vous que l’esprit ne cesse jamais de penser ; en un sens, c’est comme une chaudière qui ne manque jamais de carburant. Si nous essayons d’arrêter de penser à la tristesse ou à l’anxiété, nous ne faisons rien d’autre que d’utiliser davantage ce type de pensée comme carburant.
  • Centrer son quotidien sur la lutte contre le mal-être réduit le nombre de renforts ou de prix auxquels nous pouvons “aspirer”. Chaque fois que nous réduisons les d’activités pouvant augmenter le bien-être, nous négligeons les relations interpersonnelles et restons isolé dans notre mal-être.

Le piège du “se sentir bien”

Nous vivons dans une société mettant en avant le bien-être, la jouissance et l’éloignement autant que possible de la souffrance. Il est mal vu de pleurer, d’être triste ou de se sentir anxieux-se, et lorsque nous éprouvons certaines de ces sensations ou émotions, nous nous battons contre elles.

Dans la mesure où “se sentir bien” devient l’élément fondamental et central de nos vies, nous tombons dans son piège. En effet, c’est la recherche du bien-être parfait qui nous rend vigilants, nous permettant d’identifier les émotions négatives qui sont normales et adaptatives.

En d’autre termes, en étant dépendant-e du fait de se sentir bien ou mal, nous finissons par détecter toute sorte d’expérience psychologique désagréable, si minime soit-elle, en amplifiant son importance. Ainsi, dans une tentative de mettre de côté ces expériences psychologiques négatives (pensées et émotions), tout ce que nous obtenons est de les rendre plus fortes.

femme souffrant de trouble d'évitement expérientiel

Les conséquences du trouble d’évitement expérientiel

Au niveau social, les conséquences du trouble d’évitement expérientiel sont très importantes. Les personnes souffrant dudit trouble attendent d’être bien pour aller au cinéma, pour rester avec des ami-e-s, pour reprendre des études, pour avoir des rendez-vous, et d’une longue liste d’ectetera. Elles développent de nombreuses habitudes tendant à éviter des expériences psychologiques désagréables. C’est ainsi qu’au fil des mois et des années leur vie tourne uniquement autour de l’évitement.

C’est ainsi que nous pouvons devenir de véritables experts de ce que nous ne voulons pas, définissant nos désirs et nos aspirations exclusivement eu égard à la non-présence de ce que nous souhaitons éviter. Notre identité et notre projection du futur finissent inexorablement par être très médiocres.

Par conséquent, au niveau psychologique, l’évitement expérientiel ne fait qu’aggraver la symptomatologie associée au mal-être et appauvrit la vie émotionnelle de l’individu. Et c’est pourquoi la thérapie d’acceptation et d’engagement (développée pour surmonter les troubles d’évitement expérientiel) vise à faire accepter le mal-être et à définir des objectifs traitant des valeurs personnelles.

Le traitement du trouble d’évitement expérientiel

Tout d’abord, la solution à ce trouble réside dans l’acceptation, l’observation inconditionnelle et sans jugement des expériences psychologiques, telles que les pensées, les émotions et les sentiments. Pour atteindre cet objectif, la thérapie d’acceptation et d’engagement utilise différentes stratégies telles que le Mindfulness, la désintoxication cognitive et les métaphores thérapeutiques.

Deuxièmement, le traitement de l’évitement expérientiel se concentre sur la restauration de l’importance des valeurs personnelles face aux émotions et les comportements impulsifs du moment. De cette approche thérapeutique découle la notion “d’engagement”. En d’autres termes, il est réalisé un travail tendant à ce que la personne s’engage à maintenir ses valeurs, ce en toute circonstance. On cherche à mettre de côté la lutte contre le mal-être pour se concentrer sur la lutte pour combler la vie d’activités satisfaisantes pour soimême.

oiseaux qui s'envolent

Combattre ce trouble est une tâche ardue impliquant un chemin difficile. Néanmoins, il s’agit d’un combat nécessaire pour se libérer des pièges de la pensée et des croyances rigides qui, visant à être bien, nous conduisent à nous sentir toujours plus mal. Diriger notre vie vers nos valeurs personnelles, en acceptant le mal-être lorsqu’il se présente, nous permettra d’être plus libre et plus heureux-se.


Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.