Les neurosciences, un moyen de comprendre le comportement de l'esprit

Les neurosciences, un moyen de comprendre le comportement de l'esprit

Dernière mise à jour : 23 août, 2017

Traditionnellement, les neurosciences avaient pour objectif de connaître le fonctionnement du système nerveux. Tant au niveau fonctionnel que structurel, cette discipline essaie de connaître l’organisation du cerveau. Ces derniers temps, elle a été plus loin, ne souhaitant plus seulement connaître le fonctionnement du cerveau, mais la répercussion qu’il a dans notre conduite, nos pensées et nos émotions.

Les neurosciences cognitives ont pour objectif de mettre en relation le cerveau et l’esprit. Elles représentent un mélange entre les neurosciences et la psychologie cognitive. Cette dernière, traite la connaissance des fonctions supérieures telles que la mémoire, le langage ou l’attention. Ainsi, l’objectif principal des neurosciences cognitives est de mettre en relation le fonctionnement du cerveau avec nos capacités cognitives et comportementales.

Le développement des nouvelles technologies a été d’une grande aide au sein de ce domaine afin de pouvoir mener à bien des études expérimentales. Les études en neuroimagerie ont permis de faciliter la mise en relation de structures concrètes avec différentes fonctions, en utilisant un outil très utile pour cela : la résonance magnétique fonctionnelle. De plus, d’autres outils se sont développés comme la stimulation magnétique transcrânienne non-invasive pour le traitement de diverses pathologies.

Les début des neurosciences

On ne peut mentionner les débuts des neurosciences sans évoquer le nom de Santiago Ramon y Cajal puisqu’il est l’auteur de la théorie du neurone. Ses apports aux problèmes du développement, la dégénération et la régénération du système nerveux sont toujours d’actualité et toujours enseignés dans les facultés. S’il fallait donner une période de lancement des neurosciences, elle se trouverait au cours du 19ème siècle.

Avec le développement du microscope et des techniques expérimentales, comme la fixation et la coloration des tissus ou les recherches sur la structure du système nerveux et de sa fonctionnalité, cette discipline commença à se développer. Cependant, les neurosciences ont reçu des apports de nombreux domaines de connaissances qui ont permis de mieux comprendre le fonctionnement cérébral. On peut dire que les découvertes successives en neurosciences sont multidisciplinaires.

Les apports ont émané de l’histoire : de l’anatomie, qui permet de localiser chacune des parties de l’organisme; de la physiologie, qui est plus centrée sur la connaissance du fonctionnement de notre corps; de la pharmacologie, qui utilise des substances externes à notre corps afin d’en observer les répercussions dans le corps; et la biochimie, qui utilise des substances sécrétées par notre propre organisme comme les neurotransmetteurs.

La psychologie a également apporté d’importantes contributions pour les neurosciences, au travers des théories du comportement et de la pensée. D’année en année, le point de vue à changé partant d’une perspective de localisation dans laquelle nous pensions que chaque zone du cerveau avait une fonction concrète, pour aller vers une perspective plus fonctionnelle dans laquelle l’objectif est de connaître le fonctionnement global du cerveau.

Les neurosciences cognitives

Les neurosciences couvrent un très large éventail au sein de la science. Elles incluent la recherche basique jusqu’à la recherche appliquée qui travaille avec la répercussion des mécanismes sous-jacents du comportement. Au sein des neurosciences, les neurosciences cognitives essaient de découvrir le fonctionnement des fonctions supérieures comme le langage, la mémoire ou la prise de décisions.

Les neurosciences cognitives ont pour objectif principal d’étudier les représentations nerveuses des actes mentaux. Elles se concentrent sur les substrats neuronaux des processus mentaux. Quelle répercussion a notre comportement et nos pensées sur ce qui se passe dans notre cerveau? Des zones spécifiques du cerveau chargées des fonctions sensorielles ou motrices ont été détectées, mais elles ne représentent qu’un quart du cortex total.

Se sont les aires de l’association, n’ayant pas de fonction spécifique, mais étant chargées d’interpréter, d’intégrer et de coordonner les fonctions sensorielles et motrices. Elles seraient responsables des fonctions mentales supérieures. Les aires cérébrales qui dominent les fonctions comme la mémoire, la pensée, les émotions, la conscience et la personnalité sont quant à elles plus difficiles à localiser.

La mémoire est liée à l’hippocampe, situé dans le centre de l’encéphale. Pour ce qui est des émotions, on sait que le système limbique contrôle la soif et la faim (hypothalamus), l’agression (amygdales) et les émotions en général. Les capacités cognitives font partie du cortex, où se trouve notre capacité à être conscients, à établir des relations et à suivre des raisonnements complets.

Cerveau et émotions

La capacité à ressentir des émotions est l’une des caractéristiques essentielles de l’expérience humaine normale, nous l’expérimentons tou-te-s. Toutes les émotions s’expriment grâce à des changements moteurs viscéraux et à des réponses motrices et somatiques stéréotypées, notamment, les mouvements des muscles faciaux. Traditionnellement, on attribuait les émotions au système limbique, ce qui est toujours d’actualité, mais certaines régions encéphaliques sont impliquées.

Les autres aires dans lesquelles s’étend le processus de l’émotion sont les amygdales et la face orbitaire et médiane du lobe frontal. L’action commune et complémentaire des dites régions constitue un système moteur émotionnel. Les mêmes structures qui traitent les signaux émotionnels participent à d’autres tâches, comme la prise rationnelle de décisions et les jugements moraux.

Les noyaux viscéraux et moteurs somatiques coordonnent l’expression du comportement émotionnel. L’émotion et l’activation du système nerveux autonome sont intimement liés. Ressentir toute forme d’émotion, comme la peur ou la surprise, serait impossible sans expérimenter une augmentation de la fréquence cardiaque, de la transpiration et des tremblements… Cela fait partie du risque des émotions.

Attribuer l’expression émotionnelle à des structures cérébrales lui confère sa nature innée. Les émotions, sont en fait un outil adaptatif informant les autres de notre état moral. Il a été démontré qu’il existe une homogénéité dans l’expression de la joie, de la tristesse, de la colère… dans différentes cultures. C’est l’une des manières que nous avons de communiquer et de compatir avec les autres.

La mémoire, l’entrepôt de notre cerveau

La mémoire est un processus psychologique basique qui fait référence à la codification, le stockage et la récupération des informations apprises. L’importance de la mémoire dans notre vie quotidienne a motivé diverses recherches sur ce thème. L’oubli, lui aussi est le thème central de nombreuses études, puisque de nombreuses pathologies ont un lien avec l’amnésie qui perturbe gravement jour après jour.

La raison qui fait que la mémoire soit un thème si important est qu’elle représente une part importante de notre identité. D’autre part, bien que l’oubli dans un sens pathologique nous préoccupe, ce qui est certain est que notre cerveau nécessite de se défaire des informations inutiles pour donner une place à des apprentissages nouveaux et événements significatifs. En ce sens, le cerveau est un expert dans le recyclage de ses ressources.

Les connexions neuronales changent en fonction de l’usage ou non des ces informations. Lorsque nous retenons de l’information que nous n’utilisons pas, les connexions neuronales se fragilisent jusqu’à disparaître. De la même manière, lorsque nous apprenons quelque chose de nouveau, nous créons de nouvelles connexions. Si nous pouvons lier ces apprentissages à d’autres connaissances ou événements vitaux, ils seront plus faciles à mémoriser.

La connaissance de la mémoire a augmenté grâce à l’étude de cas victimes d’amnésies très spécifiques. Concrètement, ces cas ont aidé à mieux connaître la mémoire à court terme et la consolidation de la mémoire déclarative. Le fameux cas H.M. souligna l’importance de l’hippocampe pour établir de nouveaux souvenirs. En revanche, le souvenir des capacités motrices est contrôlé par le cervelet, le cortex moteur primaire et les ganglions de la base.

Langage et parole

Le langage est l’une des capacités qui nous différencie du reste des animaux. La capacité à communiquer avec tant de précision et la grande quantité de nuances d’expression de nos pensées et sentiments, fait du langage notre outil de communication le plus riche et le plus utile. Cette caractéristique unique à notre espèce, a incité de nombreux-ses chercheur-se-s à se concentrer sur son étude.

Les progrès de la culture humaine se basent, en partie, sur le langage, qui permet une communication très précise. La capacité linguistique dépend de l’intégrité de nombreuses aires spécialisées du cortex d’association dans les lobes temporal et frontal. Chez la plupart des individus, les fonctions primaires du langage se trouvent dans l’hémisphère gauche.

L’hémisphère droit se chargerait du contenu émotionnel du langage. La douleur spécifique des régions encéphaliques peut compromettre des fonctions essentielles du langage, en pouvant causer des aphasies. Les aphasies, peuvent avoir des caractéristiques très différentes : difficultés dans l’articulation, la production ou la compréhension du langage.

Le langage et la pensée ne sont pas alimentés par une zone concrète et unique mais bien par une association de différentes structures. Notre cerveau travaille de façon tellement organisée et complexe que lorsque nous pensons ou parlons, il réalise de nombreuses associations entre les aires. Nos connaissances préalables influenceront les nouvelles, dans un système de rétro-alimentation.

Grandes découvertes en neurosciences

Décrire toutes les études importantes pour les neurosciences serait chose difficile et très longue. Les découvertes suivantes ont banni certaines idées anciennes sur le fonctionnement de notre cerveau et ont ouvert des voies nouvelles de recherche. Ceci est une sélection de certains travaux expérimentaux importants parmi les milliers de travaux existants :

  • Neurogenèse (Eriksson, 1998). Jusqu’en 1998 on pensait que la neurogenèse se produisait pendant le développement du système nerveux et qu’à la suite de cette période, les neurones mourraient sans que de nouveaux neurones apparaissent. Mais suite aux conclusions d’Eriksson, il a pu être prouvé que même pendant la vieillesse, la neurogenèse a lieu. Le cerveau est plus plastique et malléable que ce que l’on pensait.
  • Lien entre l’éducation et le développement cognitif et émotionnel (Lupien, 2000). Dans cette étude, l’importance du contact physique du bébé lors de l’éducation a été démontré. Les bébés ayant maintenu un faible contact physique sont plus vulnérables et présentent des déficits dans les fonctions cognitives qui peuvent les affecter par une dépression ou des situations de stress profond, impactant ainsi l’attention ou la mémoire.
  • Découverte des neurones miroir (Rizzolatti, 2004). La capacité des nouveaux-nés à imiter les gestes a donné un point de départ à cette étude. Les neurones miroirs ont été découverts. Ce type de neurones se met en marche lorsque nous voyons quelqu’un d’autre réaliser une tâche. Ils facilitent l’imitation, mais aussi l’empathie et les relations sociales.
  • Réserve cognitive (Petersen, 2009). La découverte de la réserve cognitive a été très importante ces dernières années. Le cerveau est capable de compenser les lésions cérébrales. Différents facteurs comme les années de scolarisation, le travail réalisé, les habitudes de lectures, ou le réseau social ont une influence sur cela. Une réserve cognitive élevée peut compenser les dommages causés par des maladies telles que l’Alzheimer.

Le futur des neurosciences : “Human brain projet”

L’Human Brain Project est un projet financé par l’union européenne qui a pour objectif de construire une infrastructure basée sur les technologies de l’information et de la communication (TIC). Cette infrastructure a pour but de servir de base de données dans le domaine des neurosciences aux scientifiques du monde entier . Elle développe 6 plateformes basées sur les TIC :

  • Neuro-informatique : cela fournira des données d’études aux neuro-scientifiques du monde entier.
  • Simulation du cerveau : cela intégrera l’information par le biais de modélisations informatiques unifiées afin de réaliser des essais qui sont impossibles à réaliser sur des humains.
  • Calcul à haut rendement : cela donnera une technologie de super-calcul interactive dont les neuro-scientifiques ont besoin pour la modélisation et la simulation de données.
  • Calcul neuro-informatique : cela transformera les modélisations du cerveau en une nouvelle classe de dispositifs “hardware” en testant ses applications.
  • Neuro-robot : cela permettra aux chercheurs en neurosciences et de l’industrie d’expérimenter des robots virtuels contrôlés par des modélisations cérébrales développées dans le projet.

Ce projet a commencé en octobre 2013 et a une durée estimée de 10 ans. Les données qui seront compilées dans cette énorme base de données permettront de faciliter le travail de futures recherches. L’avancée des nouvelles technologies, permet aux scientifiques d’avoir une connaissance plus profonde du cerveau, même si la recherche basique a toujours de nombreuses zones d’ombres à éclairer.

Bibliographie

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Eriksson, P.S., Perfilieva E., Bjork-Eriksson T., Alborn A. M., Nordborg C., Peterson D.A., Gage F.H. (1998). Neurogenesis in the Adult Human Hippocampus. Nature Medicine.4(11), 1313–1317.

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Lupien S.J., King S., Meaney M.J., McEwen B.S.(2000). Child’s stress hormone levels correlate with mother’s socioeconomic status and depressive state. Biological Psychiatry 48, 976–980.

Purves, Augustine, Fitzpatrick, Hall, Lamantia, McNamara y Williams. (2007). Neurociencia(Tercera edición).Buenos Aires: Editorial Médica Panamericana.

Rizzolatti G., Craighero L. (2004).The mirror-neuron system. Annual Review of Neuroscience. 27, 169–192.

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